Line Vautrin

Une créatrice inspirée

Portrait de Line Vautrin

Les débuts

Née juste avant la première guerre mondiale, Line Vautrin crée ses premiers objets en bronze alors qu'elle n’a pas 21 ans. Les débuts sont difficiles. Farouchement indépendante, elle se refuse à soumettre son inspiration à la demande d’un patron – fusse un grand couturier. Elle restera fidèle à cette volonté de liberté toute sa vie.

C’est grâce à l’Exposition universelle de 1937 où elle a loué un stand qu’elle se fait connaître. Sa collection se diversifie : outre ses fameux boutons en bronze, elle présente des colliers, bracelets, boucles d’oreilles, boucles de ceinture, fermoirs de sacs, sans oublier ces accessoires de mode qui ont aujourd’hui disparu : cache-peignes, mules, chancelières, cothurnes, fourragères, calots…

Et ça marche ! L’année suivante, elle a alors 28 ans, elle ouvre sa première boutique près des Champs-Élysées, et continue à créer des pièces en bronze. Une matière à laquelle elle ajoute, au gré de sa fantaisie et de son inventivité, des perles en émail, du feutre, des plumes et de la fourrure.

La réussite

Au début des années 40, elle élargit sa gamme en créant des boîtes en bronze - poudriers, cendriers, piluliers - qui feront sa renommée. A cette même époque, elle épouse Jacques-Armand Bonnaud, un artiste polyvalent issu de l’école des beaux-arts. Décorateur, aquarelliste, il s’intéresse également au théâtre et à la poésie, avec grâce et élégance.

Ils s’installent dans un hôtel particulier du Marais qu’ils restaurent. Aménagé et meublé par les jeunes artistes de l’époque, qui depuis lors ont acquis une belle renommée, l’hôtel de Sérilly est un vivier de création et un cadre magnifique pour les présentations des collections qui sortent de l’imaginaire bouillonnant de ces deux talents conjugués. Ils y ont chacun un espace de création, à côté des ateliers où une cinquantaine d’ouvriers et d’ouvrières confectionnent sans relâche les accessoires d’élégance si prisé dans cette période de pénurie.

Jacques-Armand met tout son talent à lui donner davantage de visibilité. Grâce à lui, le 106 de la rue vieille du Temple devient un lieu à la mode. Collections, soirées, expositions, fabrication, il s’y passe toujours quelque chose. La presse magazine de l’époque s’intéresse à Line Vautrin et ses créations suscitent l’enthousiasme. Leur forme autant que leur poids ne sont pas sans évoquer les parures mérovingiennes, mais Line Vautrin, qui aime bousculer les codes, les agrémente de motifs légers.

Son humeur facétieuse et ludique, on la trouve notamment dans les rébus qui parsèment ses œuvres : Line et Jacques-Armand s’amusent à découper des poèmes et proverbes de toujours, mêlant signes et symboles, pour les inscrire sur l’espace minime d’un presse-papiers ou d’un couvercle de boîte. Leur séparation à la fin des années 50 marque un tournant dans l’évolution de Line Vautrin.

Elle aborde un matériau nouveau : l’acétate de cellulose qu’elle transforme en une nouvelle matière, le « Talosel ». Elle le façonne, le découpe, le chauffe et crée des articles de décoration où elle pourra l’utiliser au mieux : pieds de lampe, tables, paravents et surtout, miroirs. Miroirs « sorcière », miroirs convexes, trompeurs, aux cadres délicatement ouvragés, prêts à raconter une histoire. Toujours cette fantaisie malicieuse et poétique qui accompagne l’œuvre de Line Vautrin.

La boutique qu’elle ouvre rive gauche lui attire une nouvelle clientèle, mais Line est une créatrice, pas une gestionnaire, et sa prochaine étape la voit diriger une école où sera transmise une partie des procédés de confection qu’elle a développés. Sa fille, Marie-Laure Bonnaud-Vautrin, y enseignera pendant dix ans, tout en développant parallèlement son art bien à elle. Les élèves sont aussi bien des dames qui viennent occuper leur temps libre que des artisans en quête de techniques nouvelles.

Les dernières années

Au début des années 80, Line Vautrin décide de fermer l’école et se retire dans un petit appartement où elle continue à créer des objets qu’elle vend au compte-gouttes. Est-ce la fin de Line Vautrin ? L’heureuse rencontre qu’elle fera quelques années plus tard avec un collectionneur londonien la remet en selle.

David Gill sera en effet l’auteur de la re-découverte de Line Vautrin. Il organise des expositions un peu partout dans le monde, ce qui amène Line à effectuer de nombreux voyages que la créatrice infatigable ne s’était jamais autorisés.

Portrait de Line Vautrin

En 1992, elle reçoit le Prix national des métiers d'Art pour ses recherches en décoration. Elle meurt en avril 1997, deux ans avant l’exposition qu’allait lui consacrer, à Paris, le Musée des Arts Déco.

Sa recherche assidue de féminité, de raffinement, de sensualité et de subtilité, alliée à son amour des mots et son humour ont dirigé toute sa vie. Créatrice sans avoir eu de maître, cette artiste n’a suivi aucune mode et n’appartient à aucune école. Elle est véritablement originale, unique.

 

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